Publiez ce que vous payez – Congo publie un rapport de suivi des investissements publics dans le domaine de la santé

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Publiez ce que vous payez – Congo publie un rapport de suivi des investissements publics dans le domaine de la santé (exercice 2014): « De l’urgence d’améliorer l’efficacité de la dépense publique »
Le 15 décembre 2015, au Centre Sueco à Pointe Noire, Publiez ce que vous payez – Congo1 a présenté à la presse et aux représentants des administrations publiques concernées son rapport, disponible en cliquant ici, de suivi des investissements publics dans le domaine de la santé (exercice 2014), intitulé « De l’urgence d’améliorer l’efficacité de la dépense publique ».

Publiez ce que vous payez – Congo s’est engagée depuis 2012 à suivre la destination finale des revenus issus de l’exploitation des ressources naturelles et développe ainsi un programme de suivi des investissements publics dans le domaine de la santé. Ce projet s’intègre notamment dans la Stratégie 20/202 de la campagne internationale du même nom. Il s’agit d’étendre le plaidoyer pour la transparence des revenus de l’Etat – rendu possible par l’engagement du Congo dans l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) – en s’attelant à mesurer leur utilisation et leur impact sur les conditions de vie des Congolais.

Poursuivant son travail de promotion de la transparence et de monitoring de la gouvernance publique, Publiez ce que vous payez – Congo publie un nouveau rapport de suivi budgétaire. Après avoir évalué l’exécution des budgets de la santé pour les exercices 2011, 2012 et 2013 dans un rapport de décembre 2014, rapport dans l’ensemble bien accueilli par le public et les administrations, Publiez ce que vous payez – Congo témoigne à présent des résultats de l’étude sur le budget du Ministère de la Santé et de la Population de l’exercice 2014.
Le suivi de la dépense publique est indispensable au développement de meilleures pratiques en matière de gestion des finances publiques, d’autant plus que la baisse des recettes de l’Etat, conséquente à la chute des cours du pétrole, exige de réels changements de méthode et de comportement de la part de tous les acteurs. La réduction des ressources disponibles appelle en effet une réduction des déperditions tout au long de la chaîne de la dépense publique et une amélioration de l’efficacité de la dépense, afin que les fonds permettent un véritable développement économique et social, au profit de tous les Congolais.
Le travail de suivi budgétaire dans le domaine particulier de la santé vise à rechercher des solutions pour que l’accès aux soins de qualité devienne une réalité. Le Congo consacre, selon les lois de finances, des sommes très importantes à la santé – deuxième poste budgétaire des investissements exécutés en 2014 (projet de loi de règlement 2014). Il se trouve cependant que les efforts réellement consentis et les résultats observés sur le terrain ne sont pas proportionnels à ces annonces.

Cette année, pour assurer la pérennité du programme et permettre l’implication des populations bénéficiaires des projets dans leur exécution, Publiez ce que vous payez – Congo a créé et formé des groupes locaux de suivi de la dépense publique dans tous les départements. Après leur formation aux techniques d’enquête, les membres de ces groupes se sont déployés dans leur département respectif de février à octobre 2015, pour mesurer l’avancement des projets d’investissement inscrits au budget du Ministère de la Santé et de la Population de 2014.

Ainsi sur 140 projets identifiés, 120 ont été visités par 72 volontaires. Les informations récoltées sur le terrain ont permis d’identifier 7,5% des projets visités comme achevés et fonctionnels, 4,2% comme achevés mais non fonctionnels, 6,7% comme projets en cours, 18,3% comme arrêtés, et 54,2% comme des projets n’ayant jamais démarré. Pour 9,2% des projets cependant, les observateurs n’ont pu récolter aucune information fiable par rapport à l’avancée du projet, notamment parce qu’ils se sont vus opposer des refus de coopérer, notamment par les administrations des grandes structures de Brazzaville.
Ces chiffres permettent de mesurer l’écart entre les prévisions et les réalisations, et d’identifier les problèmes et pratiques qui minent la chaîne de la dépense publique, afin d’augmenter le taux d’exécution du budget. Ce diagnostic est d’autant plus important que le projet de loi de règlement portant sur l’exercice 2014 énonce que 99% du budget d’investissement du Ministère de la Santé et de la Population a été exécuté. Ce chiffre semble invraisemblable au regard du très faible taux d’exécution des projets révélé par les missions d’observation de Publiez ce que vous payez – Congo. Il est inquiétant de constater que l’Etat semble avoir une idée faussée de sa propre efficacité et de la manière dont les fonds publics ont été réellement utilisés.

Les enquêtes de terrain à l’échelle du pays ont également aidé Publiez ce que vous payez – Congo à évaluer les choix opérés par l’Etat pour améliorer l’accès aux soins des populations. Ainsi, de nombreux projets ne répondent pas nécessairement aux besoins des populations. La politique de construction des hôpitaux généraux dans tous les départements est à ce titre une bonne illustration, puisqu’il est difficile de comprendre dans quelle mesure ces structures représenteront un réel progrès pour les populations des zones reculées, qui n’ont même pas accès à un Centre de Santé Intégré de qualité.

Publiez ce que vous payez – Congo appelle ainsi les ministères en charge des finances, du plan et du budget, le ministère de la santé, et les institutions en charge du contrôle des marchés publics et de la lutte contre la corruption à respecter l’obligation d’évaluer préalablement les projets avant de les intégrer au budget, afin d’améliorer la pertinence des choix budgétaires opérés, à permettre l’accès aux documents relatifs au budget de l’Etat aux citoyens et à la société civile, à renforcer les mécanismes de contrôle et de suivi des projets et à tout entreprendre pour mettre fin à l’impunité des opérateurs et des agents de l’Etat coupables d’infraction au Code des marchés publics.

Publiez ce que vous payez – Congo appelle également la société civile et tous les citoyens à s’organiser en groupes de suivi pour rechercher l’information concernant l’investissement public dans leur zone de résidence, la disséminer, débattre avec les autorités locales, et relever les pratiques frauduleuses.

Recommandations
Au Ministère de la Santé et de la Population :

  • D’intégrer effectivement les besoins exprimés lors des conférences budgétaires par les directeurs départementaux et les responsables des grands centres de santé pour élaborer le budget,
  • De transmettre les budgets aux Directeurs Départementaux et aux responsables des structures de santé concernées,
  • D’améliorer l’accès au budget pour les populations,
  • De rendre publics les documents justifiant l’exécution de son budget 2014, projet par projet.
  • Aux Ministères en charge des finances et du plan :

  • D’exiger des études de faisabilité et une estimation des coûts systématiques avant l’intégration d’une action au budget, et de laisser le pouvoir aux services habilités de refuser un projet qui ne remplit pas les critères d’efficacité,
  • D’adapter le nombre de projets prévus (réduire si nécessaire) aux capacités des administrations de les exécuter, et des opérateurs de les mener à bien,
  • De renforcer les mécanismes de contrôle et de suivi de l’exécution du budget,
  • De tout mettre en oeuvre afin d’assurer que le Ministère de la Santé soit effectivement destinataire de tout le budget qui lui revient, sans amputation imprévue,
  • De permettre l’accès aux documents relatifs au budget de l’Etat, notamment en les mettant en ligne ou à disposition dans les services habilités,
  • De fournir tous les efforts nécessaires pour mettre en place les réformes induites par la transposition des directives CEMAC sur la gestion des finances publiques,
  • De prendre les mesures législatives nécessaires pour que le débat d’orientation budgétaire au Parlement soit intégré comme une étape à part entière du cycle budgétaire,
  • D’opérer une réelle décentralisation décisionnelle et financière en faveur des autorités locales,
  • De déléguer les missions de suivi des projets d’investissement aux autorités locales,
  • De transmettre les décisions budgétaires prises aux autorités locales concernées en début d’exercice et à chaque modification majeure.
  • A la Direction Générale de Contrôle des Marchés Publics :

  • De s’assurer de la capacité technique et de la réputation des opérateurs avant l’attribution de marchés publics,
  • D’obliger les opérateurs économiques à présenter un cahier des charges aux autorités locales avant le démarrage d’un chantier.
  • A l’Autorité de Régulation des Marchés Publics :

  • De poursuivre la vulgarisation des procédures de marchés à participation communautaire, et de s’assurer de la formation des organisations de la société civile pour une mise en oeuvre efficace de ce type de marchés,
  • De publier, comme ses missions le prévoient, un audit technique et financier d’un échantillon de marchés publics passés, à chaque fin d’exercice,
  • D’appliquer les sanctions prévues par la législation aux opérateurs véreux ou incompétents.
  • A la Commission Nationale de Lutte contre la Corruption, la Concussion et les Infractions Assimilées et à l’Observatoire Anti-Corruption :

  • Investiguer sur les cas de corruption liés aux marchés publics
  • Former et informer les administrations concernées sur les cas de corruption liés aux marchés publics.
  • Aux Parlementaires :

  • De faire valoir leurs droits à l’information sur le budget de l’Etat et son élaboration,
  • De jouer pleinement et sincèrement leur rôle de représentants des populations en relayant leurs besoins réels,
  • De renforcer leur action en matière de suivi et contrôle de l’exécution du budget.
  • Aux citoyens et organisations de la société civile :

  • De s’informer des projets d’investissement prévus dans leur zone de résidence,
  • De demander des comptes aux élus locaux et nationaux concernant l’utilisation des fonds alloués au budget,
  • De s’organiser en groupes de suivi pour rechercher l’information, la disséminer et la débattre avec les autorités locales,
  • De lancer des initiatives de vulgarisation du budget,
  • De dénoncer les actes de corruption relatifs à l’exécution des marchés publics.
  • Aux institutions internationales :

  • Renforcer les partenariats techniques avec les administrations du Congo en matière de gestion des finances publiques, en particulier avec le Ministère de la santé,
  • Appuyer techniquement les OSC oeuvrant en faveur de l’amélioration de la dépense publique en République du Congo.
  • De conditionner l’aide, l’appui technique et financier à l’amélioration de la gouvernance.
  • Pointe Noire, le 15 décembre 2015
    Communiqué de presse

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