Dans le cadre de la Norme ITIE 2019, les entreprises qui font partie de l’Initiative sont censées répondre à un ensemble de demandes de transparence (connues dans le langage ITIE sous le nom d' »Attentes« ) liées à des domaines clés tels que la transparence des contrats, des taxes, des paiements et de la propriété effective.
Le mois dernier, pour la première fois, l’ITIE a publié une évaluation de la manière dont les entreprises apportant leur soutien à l’initiative se situent par rapport aux attentes de l’ITIE à leur égard. Bien que ces attentes remontent à 2018, il s’agit de la première fois que les entreprises sont évaluées. Ceci représente une étape bienvenue pour laquelle l’ITIE doit être félicitée, en particulier le collège de la société civile qui a demandé avec succès la publication de l’évaluation entreprise par entreprise, auparavant confidentielle.
Examiner les données de plus près
Les données montrent que dans certains domaines, les attentes sont largement respectées, notamment en ce qui concerne la divulgation d’informations sur les taxes et les paiements dans les pays ITIE. De nombreuses entreprises montrent ainsi qu’elles peuvent répondre aux attentes de l’ITIE dans tous les domaines, ce qui ne fait que souligner davantage le nombre important d’entreprises qui ne le font pas.
Les lacunes sont flagrantes. La transparence des informations sur les taxes et les paiements est au cœur de la mission de l’ITIE. Pourtant, sur les 61 entreprises évaluées, 23 % ne déclarent pas ces informations dans tous les pays où elles opèrent.
Cette année, l’ITIE a déployé des efforts considérables pour sensibiliser à la nouvelle exigence selon laquelle les pays ITIE doivent publier les nouveaux contrats et les modifications de contrats. Il est donc décevant que si peu d’entreprises soutenant l’ITIE ont ajouté leur voix et montré leur soutien à la transparence des contrats publiquement : seulement 40 % l’ont fait.
L’attente de l’ITIE envers les entreprises soutenant l’ITIE en matière de transparence des contrats est peu ambitieuse : une simple déclaration publique signalant le soutien aux gouvernements, qui peuvent parfois être réticents à adopter cette transparence, suffit. La divulgation des contrats est essentielle pour mettre un terme aux transactions injustes, et c’est pourquoi PCQVP a lancé sa campagne mondiale #DiscloseTheDeal l’année dernière.
L’ITIE veut des industries extractives ouvertes et responsables. Cela n’est possible que si les gouvernements et les entreprises agissent. Si un pays de l’ITIE échoue, il peut être suspendu de l’initiative. En revanche, il n’y a pas de répercussion pour les entreprises qui ne répondent pas à ces attentes fondamentales. Pendant ce temps, elles récoltent les avantages, en termes de réputation, d’être associées à l’ITIE.
Il est décevant de constater que tant d’entreprises soutenant l’initiative ne répondent pas aux attentes, mais il est aussi très inquiétant de constater que certaines entreprises représentées au conseil d’administration de l’ITIE — qui contribuent à orienter l’avenir de l’initiative — ne parviennent même pas à répondre aux attentes, notamment les poids lourds de l’industrie et membres de longue date du conseil d’administration, Exxon et Chevron. En revanche, les membres du conseil d’administration BP, Total, BHP, Equinor et Rio Tinto répondent à toutes les attentes.
Les personnes qui siègent au conseil d’administration de l’ITIE sont importantes. La représentation d’entreprises réellement engagées dans les principes de l’ITIE renforce la confiance dans l’initiative et préserve sa réputation. Plus important encore, cela accélère le progrès. La crise climatique nous place devant une urgence mondiale. Une urgence qui ne pourra être évitée qu’avec une coopération internationale sans précédent, y compris entre les gouvernements et les entreprises. La bonne gouvernance dans les industries pétrolières, gazières et minières, ainsi que l’ITIE, peut constituer une partie importante de la solution, mais seulement avec un leadership et un engagement audacieux. Dans ce contexte, pouvons-nous vraiment nous permettre d’avoir des entreprises représentées au conseil d’administration de l’ITIE qui n’arrivent toujours pas à respecter ou soutenir des normes devenues courantes il y a des années ?
La voie à suivre
Heureusement, il existe des solutions. Les membres du conseil d’administration de l’ITIE issus de la société civile ont exposé ce qui doit se passer et la réunion du conseil d’administration de l’ITIE de la semaine prochaine sera un moment crucial pour évaluer les progrès réalisés. Ils·elles ont demandé que les attentes des entreprises soient renforcées ; que les entreprises soient régulièrement évaluées par rapport à ces attentes ; et que celles qui ne divulguent pas leurs taxes et paiements de manière exhaustive, conformément à la norme ITIE, ne soient pas représentées au conseil d’administration. Les représentant·e·s de la société civile ont également souligné la nécessité de mettre en place des normes de conformité pour les entreprises, avec des examens, des notations et des sanctions, afin que les entreprises soient soumises au même niveau de responsabilité que les gouvernements.
Ce qui ressort clairement des données publiées par l’ITIE, c’est que nous attendons mieux des nombreuses entreprises qui prétendent soutenir la transparence, et en particulier de celles qui sont représentées au conseil d’administration de l’ITIE et qui contribuent à orienter l’avenir de l’initiative.