Les voix manquantes de la transition énergétique : pourquoi l’inclusion est essentielle pour accélérer le changement

Le monde se trouve à un tournant décisif avec le changement climatique. La transition énergétique n’est pas un idéal lointain, c’est une nécessité qui doit se dérouler de toute urgence et avec détermination. Pour que cette transition réussisse à temps et de la bonne manière, elle doit être portée par une symphonie de voix. Elle doit être un effort collectif qui reflète la diversité des réalités vécues, y compris celles des plus vulnérables comme les personnes handicapées. Leurs expériences et leurs défis offrent un regard unique, renforçant notre plaidoyer en faveur d’une action urgente, et nous aidant à créer des solutions qui fonctionnent pour tout le monde. Il est essentiel que ces personnes disposent de la plateforme nécessaire pour défendre leur vision, qu’elles soient incluses dans les discussions. 

La transition énergétique : un sujet méconnu

En Guinée, nous voulions avoir un impact significatif sur la thématique de la transition énergétique. Nous voulions comprendre où nous pourrions véritablement faire la différence et souhaitions nous appuyer sur des faits, et non sur des hypothèses. Nous avons donc lancé une étude de perception pour comprendre comment la transition énergétique était comprise par les Guinéen·ne·s. 

Nous avons ciblé des régions minières et la ville de Conakry.  Ces zones sont riches en minerais critiques, essentiels aux technologies d’énergie renouvelable qui nous permettent de lutter contre le changement climatique. Cependant, l’extraction de ces ressources s’accompagne de risques importants, notamment la dégradation de l’environnement, la pollution de l’eau, les déplacements de communautés et des conditions de travail dangereuses. Les régions minières sont donc au cœur de la transition énergétique tout en supportant de manière disproportionnée ses impacts négatifs. Conscient·e·s de cette complexité, nous les avons choisies comme point central de notre recherche.

Notre étude a révélé que pour la plupart des citoyen·ne·s, y compris des membres de la société civile et même certain·e·s responsables gouvernementaux·ales, le sujet était assez méconnu. Renforcer les connaissances des communautés était donc une première étape cruciale pour leur permettre de s’engager dans la transition énergétique d’une manière qui réponde à leurs problèmes.

Au sein des communautés minières, certains groupes sont particulièrement vulnérables, notamment les personnes en situation de handicap. Les événements climatiques extrêmes, la dégradation de l’environnement et les pratiques minières dangereuses, entre autres, aggravent les obstacles à leur mobilité, leur sécurité et leur accès aux ressources, renforçant ainsi les inégalités. Inclure les personnes en situation de handicap dans la défense de la transition énergétique est essentiel, afin qu’elles puissent contribuer à façonner des solutions qui améliorent directement leur qualité de vie.

Donner aux communautés les moyens de changer

Nous avons choisi de travailler avec la Fédération Guinéenne pour la Promotion des Associations de Personnes Handicapées en raison de son vaste réseau, de son expertise et de sa légitimité à s’engager auprès de la communauté des personnes handicapées dans toute la Guinée. En tant qu’organisation nationale, la fédération fournit une plateforme centrale et unifiée pour le plaidoyer. Sa large portée s’étend au-delà des régions minières, permettant l’échange de connaissances et de ressources dans tout le pays.

Nous avons décidé d’agir, non seulement en tant qu’acteur·rice·s de changement mais aussi en tant que facilitateur·rice·s. Nous avons formé la fédération ainsi que d’autres organisations locales, et même certains membres du parlement, afin qu’ils·elles comprennent la transition énergétique dans toute sa complexité et comment elle est directement liée à la vie des personnes handicapées. Les participant·e·s sont reparti·e·s non seulement informé·e·s mais aussi inspiré·e·s, prêt·e·s à plaider eux·elles même pour leur cause.

Ensemble, nous avons élaboré un plan de plaidoyer national collectif. Les défenseur·e·s des droits nouvellement formé·e·s en ont formé d’autres, allant à la rencontre de leurs communautés, transformant les conversations et amplifiant des voix longtemps inaudibles. Nous avons lancé des émissions de radio et des campagnes sur les réseaux sociaux pour faire connaître ces idées à un public encore plus large, déclenchant ainsi une prise de conscience en chaîne.

Les résultats : plaidoyer au niveau national

Nos efforts commencent déjà à porter leurs fruits. Avec ce projet et avec tous nos partenaires, associations de personnes handicapées, de femmes et de jeunes, nous avons été les premiers à susciter le débat public sur la transition énergétique.

Les discussions que nous avons initiées et le langage utilisé commencent à trouver un écho dans les cercles gouvernementaux. Pour la première fois, l’Assemblée nationale émet des recommandations claires en faveur d’une politique énergétique. Le ministre de l’Énergie a récemment présenté des perspectives de diversification du mix énergétique, en privilégiant les ressources hydroélectriques et solaires, une avancée essentielle mais encore insuffisante.

Notre travail de plaidoyer vise désormais à porter le débat de manière encore plus directe au plus haut niveau du gouvernement. Notre premier objectif est de voir le gouvernement guinéen adopter une véritable stratégie de transition énergétique, soutenue par des politiques nationales inclusives et des lois spécifiques. Cette approche devra comprendre des visites et des consultations, notamment avec des groupes de représentation mixte (personnes handicapées, jeunes, femmes et  société civile) qui pourront dialoguer directement avec les parlementaires et autres membres du gouvernement et faire pression pour un véritable changement.

Les enseignements : donner aux communautés les moyens de diriger

Notre voyage en cours en Guinée révèle des leçons cruciales utiles pour la réalisation urgente d’une bonne transition énergétique.

  1.     Utiliser des faits pour guider l’action plutôt que juste des hypothèses : grâce à notre étude de perception, nous avons pu identifier les domaines dans lesquels nous pouvions apporter la plus grande valeur ajoutée. Au lieu de formuler des hypothèses, nous avons recueilli des preuves concrètes qui ont éclairé notre approche et nous ont permis de répondre à des besoins spécifiques, pour un impact encore plus significatif.
  2.     Le transfert de connaissances et le faire-faire : C’est une chose que des individus parlent au nom des groupes vulnérables, mais c’est tout autre chose lorsque ces groupes parlent pour eux-mêmes. En donnant aux communautés handicapées les outils et les connaissances dont elles ont besoin pour défendre leurs droits, nous leur donnons les moyens de prendre en main leur avenir. Même si la coalition PCQVP Guinée décide de se concentrer sur d’autres priorités, les organisations partenaires ont les compétences et la vision nécessaires pour poursuivre le travail.

Nous envisageons une transition énergétique où personne ne sera laissé pour compte. Quel que soit son handicap, son genre ou son statut social, chaque citoyen·ne guinéen·ne devrait avoir la possibilité et même le devoir de contribuer à un avenir équitable, durable et juste. En investissant dans les réalités locales et en soutenant les groupes vulnérables, nous pouvons créer un avenir où chacun trouve sa place. L’espoir d’un avenir meilleur repose sur le pouvoir de l’action collective et nous sommes fier·e·s de participer à ce changement.

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