L’Azerbaïdjan rétrogradé : une sanction historique par le Conseil de l’ITIE

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En réponse à l’intervention musclée du gouvernement visant l’espace civique en Azerbaïdjan, le Conseil international de l’Initiative de transparence des industries extractives (ITIE), lors de sa 29e réunion à Brazzaville (République du Congo), a décidé de retirer le statut de conformité de l’Azerbaïdjan.

C’est une décision sans précédent. Non seulement aucun pays n’avait été rétrogradé jusqu’à maintenant, ce qui rend cette décision particulièrement importante, mais l’Azerbaïdjan a également été le premier pays à avoir atteint le statut de conformité avec l’ITIE en 2009. C’est aussi une première pour un pays ayant procédé à la mise en œuvre et qui échoue lors de l’étape de validation pour ne pas avoir satisfait aux exigences relatives à une participation libre et efficace de la société civile. Contenues dans la norme de 2013, en particulier dans l’article 1.3, ces exigences ont été clarifiées et précisées dans le nouveau protocole pour la société civile tel qu’il a été adopté en décembre 2014.

À la suite de l’introduction de restrictions législatives nouvelles pesant sur les activités des ONG en Azerbaïdjan en février 20141 , la détérioration grave et bien documentée2 de la situation pour une société civile indépendante en Azerbaïdjan a empêché une véritable participation de la société civile au processus de l’ITIE. La société civile au sein du conseil international de l’ITIE a constamment demandé une réaction forte, ce qui a conduit à une mission de haut niveau en août 2014. Les conclusions de cette mission, ainsi que de nouveaux éléments de preuve sur la répression civique, ont conduit le conseil international à exprimer ses vives préoccupations en octobre 2014 et à déclarer que « la situation pour les organisations de la société civile est inacceptable ». 3 Invitant le gouvernement azerbaïdjanais à réaffirmer son engagement à respecter les principes de l’ITIE, le conseil a demandé une validation précoce et décrit trois mesures correctives que le gouvernement devrait mettre en œuvre afin de restaurer l’environnement favorable.

Entre octobre 2014 et mars 2015, l’Azerbaïdjan a omis d’aborder les mesures correctives exigées par le conseil de l’ITIE et d’autres législations restrictives ont été mises en place par le président en décembre 2014. Par conséquent, lors de sa réunion d’avril, le conseil a décidé de sanctionner l’Azerbaïdjan, en soulignant avec insistance le principe de l’ITIE visant à une participation libre et indépendante de la société civile dans la gouvernance des ressources naturelles. Il a été demandé au conseil d’adopter l’« action la plus importante qui soit » par près de 300 groupes de la société civile de 35 pays qui sont tous fortement engagés à veiller à ce que les ressources naturelles bénéficient à la population.

Gubad Ibadoglu, membre du conseil de la société civile de l’ITIE, qui dirige le Centre de recherche économique en Azerbaïdjan, est prudemment optimiste. « Bien que je salue la décision sans précédent du conseil de l’ITIE, mes collègues et moi-même nous attendons à ce que notre gouvernement prenne cette décision au sérieux en créant l’espace requis pour que la société civile puisse s’impliquer dans la gouvernance des ressources naturelles et l’ITIE. »

Marinke van Riet, directrice internationale de PCQVP a repris ces paroles et a ajouté : « Le conseil a pris une décision nécessaire en phase avec son devoir de défendre les principes de base de l’ITIE. Ce faisant, cela a envoyé un message au monde et aux autres pays de l’ITIE pour indiquer que les restrictions sur la capacité de la société civile à participer efficacement à l’ITIE ne seront pas tolérées. Toutefois, PCQVP et d’autres surveilleront attentivement le gouvernement en travaillant avec la société civile indépendante au niveau local pour veiller à ce que les actions correctives soient appliquées. Sinon, le statut de l’Azerbaïdjan en tant que membre de la famille de l’ITIE sera révoqué. »

L’Azerbaïdjan a un an pour mettre en œuvre les mesures correctives énoncées par le conseil de l’ITIE.

1. Ensemble, les règles soumettent les ONG à un contrôle étendu de l’État, contrairement aux garanties de la liberté d’association, y compris s’agissant de leur immatriculation, de leur gouvernance, de la réception du financement et des opérations bancaires.

2. Voyez par exemple : Les déclarations faites par la Commission de Venise ; par le groupe de travail des Nations Unies sur le commerce et les droits de l’Homme ; ou Human Rights Watch

3. Lisez la déclaration de Clare Short, présidente du conseil de l’ITIE.

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