Pendant plus d’une décennie, malgré les arrestations et les intimidations, les activistes de PCQVP au Congo-Brazzaville ont fait campagne pour découvrir combien le pays reçoit de son pétrole. Bien que ce pays soit l’un des cinq plus grands producteurs de pétrole de l’Afrique subsaharienne, près des trois quarts de la population sont censés vivre avec moins de 2 dollars par jour – pour PCQVP Congo B, cela doit changer.
La coalition a connu des succès importants en termes d’accès aux données extractives et de leur diffusion. Cependant, bien qu’elle continue à mener cette campagne, cet aspect n’a toujours été qu’un côté de la médaille. L’autre a été de suivre l’argent et de trouver où les recettes ont été versées et pourquoi, si le gouvernement déclare chaque année des recettes pétrolières élevées (les recettes extractives représentent plus de 90 % des revenus du gouvernement), les conditions de vie des citoyens congolais ne se sont pas améliorées.
Dans un rapport publié le 3 décembre, PCQVP Congo-Brazzaville a examiné les budgets de la santé de 2011, 2012 et 2013 et a suivi l’argent pour voir comment les projets sont en cours de réalisation. Entre décembre 2013 et octobre 2014, PCQVP Congo B a effectué huit visites de terrain couvrant 192 projets.
Les principales constatations…
- Globalement, seul un petit pourcentage des projets était terminé (16 % ). Seuls 9 % du total des projets étaient en fonctionnement – les autres bâtiments étaient construits, mais n’étaient pas encore été équipés ou n’étaient pas conformes aux normes.
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Plus de la moitié (56 %) des projets indiqués dans les budgets de 2011, 2012 et 2013 n’avaient pas été lancés.
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16 % des projets étaient abandonnés et n’étaient pas récupérables.
Le rapport met également en évidence plusieurs conclusions importantes quant à la manière dont les projets ont été décidés et exécutés, y compris :
La nécessité d’un processus budgétaire ouvert et participatif – Au cours de ses investigations, la coalition a découvert que 80 % des projets ont fait l’objet d’une décision sans qu’il y ait eu une évaluation de faisabilité, ce qui signifiait que des projets étaient proposés par les ministres au niveau central sans qu’il y ait suffisamment d’informations sur leur caractère réaliste ou sans savoir s’ils répondaient à un besoin précis et véritable. Cela a abouti à des projets qui n’étaient pas adaptés à leur objet ou prioritaires, par exemple dans Kouya avec la construction d’un hôpital général, ainsi que d’un centre de santé, en dépit du fait qu’il n’y a pas assez d’habitants sur place pour justifier une telle infrastructure. L’absence d’évaluations de la faisabilité rend très difficile une détermination réaliste des coûts des projets et, selon les recherches entreprises par PCQVP, les budgets alloués étaient souvent bien au-dessus de ce que les projets coûteraient en réalité, ce qui nous amène à la question de savoir ce qu’il advient de l’excédent des fonds alloués.
L’importance d’un meilleur processus de passation de contrats – Comme conséquence de la nature hautement centralisée de la prise de décision, presque tous les contrats ont été accordés à des entreprises ou des entrepreneurs situés à Brazzaville, et ils ont été conclus sans avoir consulté les autorités locales où le travail devait s’effectuer. La coalition indique que la médiocre qualité du travail effectué pour certains des projets soulève des questions quant à ceux qui obtiennent les contrats, et pourquoi. Plus inquiétant encore, le rapport a mis en évidence plusieurs cas de conflits d’intérêts – les contrats sont allés à des entreprises appartenant (directement ou indirectement) aux employés de l’administration (fonctionnaires, ministres, militaires, etc.). Il a également été révélé des problèmes de corruption au niveau des entrepreneurs, par exemple à Owando où il semble que l’un d’eux s’est enfui avec les fonds en poche, laissant derrière lui une construction incomplète. En outre, il n’existe pas de système de sanctions contre les entrepreneurs corrompus ou incompétents.
Un manque de transparence conduit à la manipulation – Le budget n’étant pas librement disponible ou largement diffusé, il y a un manque de clarté quant à savoir qui finance vraiment les projets. Dans certains cas, cela se traduit par de la manipulation politique puisque les élus locaux présentent des projets qui ont été financés par les deniers publics comme des « initiatives personnelles », ce qui leur permet d’augmenter leur popularité en période électorale. D’autres divergences se sont aussi révélées en raison de ce manque de clarté – Les projets de Divenié, Banda, Mossendjo et Makoua, énumérés dans le budget du gouvernement étaient apparemment également réalisés grâce aux fonds de l’ENI au Congo. La coalition creusera davantage ce sujet pour savoir ce qui s’y passe.
La différence entre la rhétorique et la réalité – Juridiquement, les budgets du Congo-B devraient être publiquement accessibles aux citoyens. Toutefois, la coalition PCQVP a rencontré de nombreuses difficultés pour y accéder et a pu finalement le faire grâce à des contacts personnels plutôt qu’au moyen d’un processus simple et ouvert. Le manque de transparence ne concerne pas seulement la population – Des échanges avec les autorités locales ont révélé qu’elles ont elles-mêmes rarement reçu des informations concernant des projets qui devaient être réalisés dans leur région – Les documents rédigés grâce aux recherches de PCQVP Congo sont devenus une source d’informations importante pour eux.
Voici comment ont été utilisées les recettes pétrolières, une ressource qui ne durera pas éternellement, du Congo-B – pour des projets qui ont été inachevés, retardés ou mal conçus. PCQVP Congo Brazzaville a élaboré une série de recommandations, de sorte que l’élaboration et l’exécution de ces projets puissent être améliorées.
Une liste complète est disponible dans le rapport lui-même mais quelques recommendations clés comprennent :
Aux autorités centrales de:
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Rendre disponibles et accessibles tous les documents relatifs au budget national.
- Mettre en place, au niveau local, une coordination chargée de suivre l’exécution des projets.
- Faire participer les experts de santé dans l’élaboration des projets afin que ceux-ci soient pertinents.
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Exiger des études de faisabilité préalables avant l’inscription d’un projet au budget.
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Rendre transparent le processus d’octroi des marchés publics en adhérant à la participation des représentants des médias et des membres de la société civile ayant des capacités dans le domaine de la bonne gouvernance.
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Appliquer, dans le cadre des marchés publics, les sanctions relatives au non-respect des engagements par les opérateurs véreux.
Aux autorités locales de:
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Demander et se procurer les informations budgétaires concernant leur circonscription auprès des administrations centrales.
- Créer des comités de surveillance des projets dans les quartiers et villages.
Lisez le rapport entier ici et ou une synthèse ici