Le secteur de la pêche sera dorénavant intégré dans l’Initiative pour la transparence des Industries extractives (IETI). L’annonce a été officiellement faite par le Président de la République Islamique de Mauritanie, Monsieur Mohamed Ould Abdel Aziz, le 19 janvier 2015 dans son discours d’ouverture de la Conférence de haut niveau sur « la transparence et le développement durable en Afrique ».
Selon les statistiques du Ministère mauritanien des pêches et de l’économie maritime, le secteur de la pêche représente 6% du Produit Intérieur Brut (PIB) en 2009. Au titre de l’année 2010, ce secteur a généré 16% des recettes budgétaires de l’Etat et 13,3% des recettes d’exportation.
En termes de potentiel halieutique, les eaux mauritaniennes figurent parmi les plus riches au monde, avec des captures de l’ordre de 900.000 tonnes par an.
Le secteur est également un pourvoyeur important d’emplois. En effet, plus de 30.000 personnes vivent de cette activité et « le sous-secteur de la pêche artisanale est de loin la première source de création d’emplois directs », précise le ministère mauritanien. La majeure partie des recettes enregistrées par la Mauritanie provient des compagnies étrangères possédant des licences d’exploitation mais surtout celles de l’Union européenne qui a dispose d’un accord de pêche avec la Mauritanie. Aux termes de cette convention, l’Union Européenne verse chaque année une somme d’argent à ce pays pour que ses chalutiers puissent en contrepartie exploiter les ressources halieutiques mauritaniennes. En vertu des accords signés pour la période 2008-2012, l’Union Européenne a respectivement versé à la Mauritanie 86, 76, 73 et 70 millions d’euros pour les 4 premières années. A cela s’ajoutent les redevances perçues sur les navires européens.
La décision de la Mauritanie d’étendre le périmètre de l’ITIE à la pêche est perçu comme un résultat du plaidoyer des organisations de la société civile en général et de la Coalition « Publiez Ce Que Vous Payez (PCQVP) » en particulier. Mohamed Abdallahi, journaliste et membre fondateur de la coalition mauritanienne PCQVP, précise que « depuis des années nous n’avons eu de cesser de réclamer l’inclusion du secteur de la pêche dans l’ITIE en raison de l’importance économique de ce secteur et sa capacité à générer des ressources financières en vue d’un développement durable de la Mauritanie. Monsieur Abdallahi précise que si le gouvernement était au début réticent à une telle extension, sa position a, par la suite évolué, avec notamment l’appui apporté par la Banque Mondiale à la Mauritanie pour mieux structurer ce secteur. «Le secteur de la pêche pourrait être un facteur de développement durable car contrairement aux mines, au pétrole et au gaz, les ressources halieutiques sont renouvelables, conclut-il. ».
Cependant, il faut noter que même si les ressources halieutiques sont renouvelables, une bonne gestion et une exploitation encadrée sont nécessaires pour d’une part éviter la raréfaction voire l’extinction des espèces et d’autre part permettre le maintien des emplois créés par la pêche artisanale. En effet, la surexploitation des ressources halieutiques par la pêche industrielle présente un danger pour la survie de la pêche artisanale. Le cas du Sénégal est illustratif à ce sujet car les eaux de ce pays ont été vidées de leurs richesses au point où les pêcheurs sénégalais se sont rabattus sur la Mauritanie pour continuer à travailler. Cette situation a amené le Sénégal à négocier des accords de pêche avec la Mauritanie. Aux termes de ces accords, en 2014, le Sénégal a bénéficié de «400 licences de pêche pour la capture de 50.000 tonne de poissons dont 12.000 tonnes seront débarquées en Mauritanie», selon le Secrétariat Permanent de l’ITIE Mauritanie. En contrepartie, le Sénégal doit verser 747.000 euros à la Mauritanie.
L’inclusion de la pêche dans le périmètre de l’ITIE va incontestablement accroitre la transparence dans ce secteur car on pourra savoir de façon exhaustive connaître les montants générés par cette activité et faire le suivi de leur utilisation. Pour Ba Aliou Coulibaly, Coordinateur Technique de PCQVP Mauritanie, l’extension de l’ITIE à la pêché n’est pas un fait isolé. C’est plutôt une bonne opportunité pour les organisations de la société civile de faire le travail de suivi et de plaidoyer en utilisant notamment l’opportunité des Directives Européenne sur la divulgation obligatoire des revenus des industries extractives. « L’Union Européenne étant le principal partenaire de la Mauritanie en matière de pêche, nous pensons que les directives sur la divulgation obligatoire qui sont en train d’être transposées dans les pays membres permettront d’avoir des informations fiables sur les paiements effectués par les compagnies qui exploitent nos ressources », a conclu Coulibaly.