Les preuves que les femmes sont affectées de manière disproportionnée au niveau social, écologique et économique par les projets miniers, gaziers et pétroliers sont accablantes. Et alors que les hommes tirent plus de bénéfices du secteur extractif, les femmes en subissent davantage les impacts négatifs.
Pour marquer la Journée internationale des femmes, huit femmes exemplaires de notre mouvement mondial partagent leurs expériences inspirantes sur le travail qu’elles mènent sur le terrain pour transformer les secteurs pétrolier, gazier et minier.
Elles partagent leurs objectifs communs visant à accroître la transparence, éliminer la corruption et la mauvaise gestion, et révèlent également les obstacles auxquels elles sont confrontés ainsi que ce qui les inspire.
Les femmes extraordinaires que nous mettons en avant sont:
Chenai Mukumba, Zambie.
Chenai est l’une des défenseuses les plus dynamiques et les plus respectées d’une répartition des bénéfices tirés des richesses naturelles de la Zambie qui profite à tous. En tant que présidente du Conseil mondial de PCQVP, elle se consacre à la promotion de l’égalité des sexes afin que le secteur extractif cesse d’ignorer la voix des femmes et leur expérience. Chenai est également coordinatrice nationale de Consumer Unity and Trust Society (CUTS) International à Lusaka, qui est le bureau d’Afrique australe du groupe mondial de réflexion de CUTS pour la recherche et le plaidoyer. Elle dirige tous les travaux de recherche et politiques liés aux domaines de programmes de CUTS, et participe à divers groupes de travail et comités techniques du ministère du Commerce et de l’Industrie, et du ministère de la Planification du Développement national. Auparavant, elle travaillait en tant qu’analyste politique au Centre pour le commerce, l’économie et l’environnement de CUTS en Inde et à l’Organisation mondiale du travail dans les divisions de l’agriculture et du développement.
« Depuis toute petite, je suis passionnée par l’écriture et la recherche. Cependant, lorsque j’étudiais à l’université, j’ai réalisé que je pouvais allier cette passion avec ma quête de justice sociale et économique en l’utilisant comme un outil de plaidoyer.
La contribution et la participation des femmes au secteur minier artisanal et de petite échelle manquent fréquemment de reconnaissance et d’appréciation, ce qui peut avoir de graves conséquences.
Dans certains pays, le secteur minier artisanal et de petite échelle est un acteur important du secteur extractif, mais il est souvent mis sur la touche lors de l’élaboration de politiques. Par exemple, au Ghana, le secteur minier artisanal et de petite échelle a contribué en 2016 à 31 % de la production nationale aurifère. Cependant, la participation des femmes à ce secteur est souvent caractérisée par la discrimination, ce qui les empêche d’en tirer pleinement profit. Un certain nombre de normes et de tabous limitent la participation des femmes à divers aspects du secteur, et elles occupent souvent les emplois les moins rémunérés. Cela malgré les preuves démontrant que les revenus des femmes dans ce secteur subviennent de plus en plus aux besoins de leurs familles et leur permettent d’avoir accès à de nouveaux débouchés économiques.
L’un des principaux obstacles auxquels je dois faire face est le fait que beaucoup pensent que, parce que je dirige une organisation, je n’ai aucune difficulté à surmonter. Même en tant que dirigeante, je me rends compte que de nombreux obstacles demeurent, qui peuvent d’une certaine manière être plus difficiles parce qu’ils sont plus tangibles. J’ai fait face à de nombreuses situations dans lesquelles je ne bénéficie pas d’emblée des mêmes avantages que les hommes, comme le bénéfice du doute. Avant même que je ne dise quoi que ce soit, je dois souvent prouver que je suis digne d’être présente, et ce n’est qu’alors que ma contribution sera prise au sérieux.
Même dans les moments où l’avenir semble le plus sombre, il est important de ne jamais perdre courage et de toujours garder espoir dans un avenir meilleur. »
Emily Nickerson, Canada.
Emily est à l’avant-garde des efforts de la société civile pour exiger une reddition de compte du secteur extractif au Canada. En tant que directrice de PCQVP Canada, elle prône une transparence accrue dans le secteur national minier, qui est l’un des plus importants au monde, afin que le gouvernement rende des comptes à ses citoyens sur la gestion des richesses naturelles. Auparavant, elle était directrice des programmes de l’initiative Mining Shared Value (MSV) d’Engineers Without Borders Canada. Son travail comprenait la direction de partenariats en vue de la transparence de la passation locale de marchés.
« Ayant grandi dans une province dont l’économie dépendait fortement des ressources naturelles, j’ai compris l’importance d’une gouvernance solide et les conséquences d’une gouvernance déficiente, particulièrement sur la prise de contrôle par l’élite économique qui engendre une baisse de l’accès aux services publics.
Le secteur extractif, que ce soit au niveau des entreprises et sur le terrain, continue à être largement dominé par les hommes. D’innombrables défis en résultent, que ce soit pour les femmes qui travaillent dans ce secteur, ou pour les communautés qui vivent près des projets. Parmi ces défis se trouvent les risques élevés de harcèlement et d’agression parce que nous vivons dans une société qui continue à fortement sexualiser les femmes et que de nombreux cas d’abus ne sont pas signalés. La police ne défend pas les droits des victimes de manière adéquate, et peu d’hommes doivent répondre de leurs actes.
Pour de nombreuses raisons, y compris leurs responsabilités familiales supplémentaires et leur sous-représentation dans la sphère politique, les femmes continuent à jouer un rôle limité dans le processus décisionnel. Dans le secteur extractif, cette limitation peut aller spécifiquement de l’approbation des projets à l’utilisation des recettes. Les femmes ne sont pas suffisamment impliquées, et même pas du tout dans certains cas, dans les décisions quant aux plans de développement de leurs communautés et à la gestion des répercussions des projets, comme l’extraction minière.
En tant que jeune femme travaillant dans un domaine largement dominé par les hommes, j’ai fait face à de nombreux préjugés, conscients ou non, de la part de mes collègues et partenaires. Par exemple, des suppositions sont régulièrement formulées à mon égard : parce que je suis une femme, je suis forcément organisée ou parce que je suis une femme, je devrais faire la prise de notes pendant les réunions.
Je dois contrer certains de ces obstacles en m’imposant plus que les hommes (sans me préoccuper de comment mon attitude est perçue). Si un collègue moins expérimenté est présent à la réunion, je fais en sorte de lui demander spécifiquement de prendre des notes. Je fais plus attention à ma tenue vestimentaire lors des conférences.
Les autres femmes ambitieuses qui changent ce secteur m’inspirent. Parfois, je me sens très seule face à ces obstacles, et ce sont elles qui me redynamisent, m’inspirent et me motivent à persévérer. »
Erisa Danladi, Nigeria.
Erisa met à profit ses vastes et diverses expériences, en tant qu’exploitante agricole, experte en développement communautaire et entrepreneur, dans le cadre de son rôle au sein du Comité de Pilotage Afrique de PCQVP et dans son travail sur le terrain, soutenant les communautés touchées par les activités minières. Elle a travaillé comme consultante et bénévole pour une plus grande variété d’organisations. Outre son expertise dans les droits humains et dans les questions sanitaires, socio-économiques et environnementales, Erisa détient un master en littérature et critique dramatiques, un doctorat en théâtre et développement communautaire, et elle est également diplômée du Nigerian Institute of Management (Institut nigérian de gestion).
« Lorsque j’étais jeune, ma famille, en particulier mon père, m’a inspiré à me surpasser. J’ai la chance d’être issue d’une famille qui a beaucoup soutenu notre scolarité, en particulier celle des filles, ce qui n’est pas toujours le cas au Nigeria.
Au début, je voulais étudier le droit pour plaider en faveur des enfants vulnérables de ma communauté. Je voulais être leur porte-parole, mais j’ai changé d’orientation et ai fini par étudier le théâtre et les arts de la communication. J’ai découvert que je pouvais mieux soutenir ma communauté par ce biais, non seulement les enfants, mais également les femmes et les jeunes.
La persistance des inégalités entre les sexes dans les industries extractives continue à porter atteinte aux droits et au potentiel des femmes, en particulier dans les communautés touchées par les activités minières où les femmes sont plus lésées.
Dans ma communauté, les femmes sont confrontées à de nombreux défis et obstacles, y compris dans le domaine de la santé. Par exemple, les femmes de Maiganga sont victimes de la poussière provenant de la mine de charbon. L’eau potable est contaminée, ce qui entraîne des fausses couches en début de grossesse.
Les femmes sont exclues des consultations sur les projets miniers bien qu’elles en subissent le plus les conséquences néfastes. Le manque d’accès à l’information et le manque de connaissance de leurs droits ne font qu’empirer leur condition, même si l’augmentation de la sensibilisation a amélioré un tant soit peu la situation.
En tant que jeune femme passionnée, je suis confrontée à de nombreux défis, particulièrement le mépris du fait de mon âge et de mon genre. Cependant, je suis inspirée par le concept de postérité : Je veux laisser en héritage une société où les enfants, les jeunes et les femmes bénéficient des bienfaits naturels provenant du sol, de la Terre, en d’autres termes, les matières extractives. »
Gloria Majiga, Malawi.
Gloria s’est construit une réputation mondiale au cours des cinq années en tant qu’écologiste militant dans les domaines de l’exploitation minière, de la gestion forestière et foncière, et du changement climatique. En tant que coordinatrice nationale pour PCQVP Malawi, elle travaille sans relâche pour renforcer les capacités des communautés touchées par l’exploitation minière. Gloria est convaincue qu’une responsabilité et une transparence accrues dans le secteur constituent une condition préalable à l’implication des communautés dans les discussions sur les politiques qui les touchent, et la clé de la justice sociale. Gloria travaille actuellement avec les communautés pour renforcer leurs aptitudes à utiliser des outils, tels que le consentement libre, préalable et éclairé et le suivi du plan de gestion environnementale et sociale. En 2019, elle a obtenu une bourse Mandela Washington Fellowship de Kansas University.
« J’étudiais à l’université lorsque l’une de mes chargés de cours, Dr Chiweza, m’a inspirée à développer mon intérêt dans les processus inclusifs de politique publique et de développement. Elle était l’une des seules femmes au Malawi impliquées dans la recherche sur la bonne gouvernance.
J’ai choisi de me concentrer sur le secteur extractif, alors en expansion. Le Malawi venait d’adhérer à l’ITIE.
Le secteur est depuis toujours dominé par les hommes, et les incidences sociales et environnementales sont du ressort des femmes qui n’en tirent aucun profit économique.
L’industrie extractive est rongée par des pratiques insoutenables qui bouleversent l’équilibre de la nature. Ces pratiques peuvent priver les populations d’eau et des ressources forestières dont elles dépendent pour survivre. L’implication limitée des femmes dans le secteur minier signifie également qu’elles n’ont pas de source alternative pour pallier à la perte de leurs moyens de subsistance.
L’un des principaux obstacles auxquels je fais face dans l’industrie extractive est l’idée que ma présence sert uniquement à satisfaire un quota, que je suis dans la même pièce que les « experts », qui sont des hommes, uniquement pour que l’organisation puisse cocher la case « genre ».
Je dois souvent commencer par prouver que je suis tout aussi compétente et capable que les hommes qui ont « mérité » leur place. Le meilleur conseil que j’ai jamais reçu pour surmonter ce défi, c’est d’oser me présenter et d’obtenir des résultats ! De croire en mes compétences et d’être suffisamment confiante pour m’asseoir avec les hommes, et même manger avec eux.
Ce qui me donne l’espoir que nous pouvons changer les choses et apporter notre pierre à l’édifice, peu importe combien de temps le changement prendra, c’est la force et la résilience incroyables des femmes. »
Diana Kaissy, Liban.
Le parcours de Diana est extraordinaire : de coordinatrice régionale de PCQVP MENA, à dirigeante du développement d’une nouvelle ONG au Liban et membre du conseil international de l’ITIE depuis 2019. Elle est le tout premier membre du conseil à représenter la société civile de la région MENA. En tant que directrice exécutive de l’Initiative libanaise pour le pétrole et le gaz (LOGI), une ONG indépendante de Beyrouth, Diana promeut la transparence et la responsabilité dans le secteur pétrolier au Liban. En 2018, elle s’est vue décerner le prix du client de l’année par Leadership Management International.
« J’étais captivée par l’idée qu’une action collective pourrait engendrer un changement social positif bien avant de m’intéresser à la concrétisation de cette idée dans le secteur extractif.
Au Liban, le secteur extractif a des répercussions démesurées sur les femmes, particulièrement dans le domaine de l’emploi. Les hommes ont en effet plus de débouchés que les femmes. Par exemple, le droit du travail comprend des articles interdisant les femmes d’occuper des emplois « dangereux », incluant, sans s’y limiter, l’extraction minière et l’exploitation de carrière, ce qui entraîne un déséquilibre flagrant entre les sexes. Par conséquent, l’une des choses principales sur lesquelles je me penche actuellement est de garantir l’existence d’une politique de l’emploi respectueuse de l’égalité des chances afin de protéger la participation des femmes au secteur pétrolier et gazier au Liban.
Le principal obstacle auquel j’ai dû faire face, particulièrement dans la région MENA, consistait à devenir une source crédible d’informations pour que les membres de la coalition, nombre d’entre eux étant des ONG dirigées par des hommes, me prennent au sérieux, écoutent mes conseils et suivent mes orientations. J’ai dû redoubler d’efforts pour y parvenir. Le renforcement de mes connaissances et de mon expertise dans les domaines principaux dont la coalition avait besoin m’a aidé à gagner en crédibilité.
Ce qui nous inspire à continuer et à croire que le changement, et la rupture avec les normes sont possibles, c’est le travail de nos collègues du mouvement PCQVP. Avoir un impact à long terme par le biais de l’action collective nous inspire à nous surpasser. »
Olena Pavlenko, Ukraine
Olena est l’une des personnalités les plus respectées dans la tentative de l’Ukraine visant à réformer son secteur énergétique. Au cours des dix dernières années, elle s’est consacrée à essayer de renforcer la transparence de l’industrie, d’améliorer sa gouvernance et de favoriser l’accès à l’élaboration des politiques au grand public. Olena est présidente du DiXi Group, un groupe de réflexion établi à Kiev et spécialisé dans la recherche et les consultations dans le domaine de l’énergie. Elle est également membre du Comité de pilotage de PCQVP représentant l’Eurasie, et vice-présidente du groupe multipartite sur l’ITIE.
« Les personnes qui m’entourent m’inspirent. Je crois que nous connaissons tous des personnes : des parents, des amis ou des proches qui nous poussent à faire preuve de créativité ou à poursuivre nos ambitions. Je me sens inspirée par mon équipe au sein du DiXi Group, qui œuvre à apporter des changements positifs dans le secteur énergétique ukrainien, en plaidant en faveur d’une meilleure gouvernance et d’une transparence accrue.
Lorsque des personnes entendent le mot « extraction », elles pensent généralement aux plateformes de forage et aux hommes en casque. Je pense que ce stéréotype dissuade de nombreuses femmes de travailler dans ce secteur. Par conséquent, lorsque notre groupe de réflexion tente d’inciter davantage de femmes expertes à se pencher sur les questions de gouvernance, cela peut constituer un véritable défi, bien que celles-ci soient à la fois formidables et très intelligentes. Pour « survivre » dans un environnement à prédominance masculine, les femmes doivent travailler beaucoup plus dur et obtenir de bien meilleurs résultats. Et même dans ce cas de figure, cela ne garantit pas qu’elles seront reconnues à leur juste valeur ou qu’elles recevront une promotion.
Le manque de temps est également un autre obstacle auquel les femmes sont confrontées, en vue de réaliser toutes les tâches prévues.
La vision des femmes qui réussissent fait encore l’objet de nombreux stéréotypes. Cela leur nuit souvent : elles se sentent dévalorisées et sont malheureuses. Il est capital de briser ces stéréotypes en faisant en sorte que les femmes communiquent et coopèrent les unes avec les autres.
En Ukraine, nous comptons des femmes politiques très actives, qui ont créé un groupe spécial au Parlement et qui plaident pour la création d’un poste de médiateur pour l’égalité des sexes au sein du gouvernement. Nous disposons également du club Women Energy, qui réunit les femmes travaillant dans le secteur de l’énergie en Ukraine. Bien sûr, il reste tellement de choses à accomplir, mais il est bon de constater que les personnes autour sont prêtes à nous soutenir.
En ces temps difficiles, mon entourage m’insuffle cette volonté de ne jamais abandonner. »
Wallis Yakam – Papouasie-Nouvelle-Guinée
Wallis a consacré sa vie professionnelle à l’amélioration de la vie des personnes touchées par les industries de l’or, du cuivre, du nickel, de l’argent, du cobalt, du pétrole et du gaz de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Pendant des années, ces secteurs ont été source de conflits, de griefs et de pollution pour les communautés vivant à proximité des exploitations. En tant qu’actrice du changement, Wallis est depuis sept ans à l’avant-garde de cette lutte, en protégeant les droits des personnes et en visant l’amélioration de la gouvernance du secteur. Elle est actuellement directrice exécutive du Consultative Implementation and Monitoring Council (CIMC), et témoigne d’une riche expérience en matière de politique publique et de gouvernance. Elle est également membre de PCQVP en Papouasie-Nouvelle-Guinée, – appelé la ‘Papua New Guinea Resource Governance Coalition’ qui est hébergée par le CIMC et, à ce titre, contribue à la coordination et à la facilitation de la participation de la société civile au processus de l’ITIE.
« Je suis inspirée par mes collègues du CIMC, ainsi que par les personnes que je rencontre et qui accomplissent un travail remarquable en vue de promouvoir la bonne gouvernance de mon pays. Mon organisation m’a appris à défendre les laissés-pour-compte, afin qu’ils puissent faire partie intégrante de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques publiques. Ces groupes vulnérables comprennent : les femmes et les jeunes, les personnes handicapées, les personnes atteintes du VIH et du SIDA, ainsi que les personnes analphabètes ou les personnes vivant dans des régions éloignées du pays.
La PNG est riche en ressources extractives, mais les bénéfices ne font pas l’objet d’un partage équitable. Ma tâche principale consiste à essayer de régler ces problèmes.
En raison de leur dévalorisation, les voix des femmes ne sont entendues à aucun niveau. Par conséquent, elles ne reçoivent notamment pas la juste part des bénéfices issus de l’exploitation minière, qu’il s’agisse du paiement de redevances, de la participation à des entreprises dérivées ou de perspectives d’emploi. Très peu d’opportunités se sont présentées pour elles.
Cependant, les investisseurs du pays ont reconnu ce fait et ont créé des initiatives en vue de promouvoir la participation des femmes. Certains investisseurs promeuvent enfin des femmes à des postes de direction. Le nombre de femmes qui occupent des emplois auparavant réservés aux hommes, comme la supervision des mines souterraines, est en augmentation. Je suis en train de créer une plateforme nationale pour garantir que la participation des femmes au sein du secteur extractif soit intégrée à notre politique nationale.
L’un des principaux obstacles pour les femmes dans mon pays est que la société est principalement dirigée par les hommes. J’ai grandi dans une communauté à prédominance masculine, où les femmes et les enfants n’ont aucun rôle dans la prise de décision.
Enfant, j’ai appris à ne pas remettre en question les décisions des hommes. Les garçons héritent de la terre de nos pères, et les femmes doivent migrer vers la terre de leur mari lorsqu’elles se marient. C’est pour cette raison que nous sommes des citoyens de seconde classe dans notre propre pays.
Je pense avoir brisé les barrières entre les sexes dans ma société. Celles que je rencontre couramment proviennent de notre culture et de nos traditions. Tant que nous ne briserons pas ces barrières au moyen d’initiatives innovantes, notamment en présentant des femmes qui montrent l’exemple et en racontant leur histoire, la participation des femmes continuera d’être entravée.
J’espère que ces problèmes pourront être surmontés par toutes les femmes de mon pays, ainsi que par notre réseau dans le monde entier, qui continuent à plaider courageusement en faveur d’une plus grande transparence et d’une plus grande responsabilité dans le secteur de l’extraction. »
Françoise Pioupare, Burkina Faso.
Françoise a grandement contribué à l’existence des femmes touchées par les activités minières au Burkina Faso. Ancienne agent dans le milieu bancaire, ex Banque Nationale de Développement du Burkina (BND-B), elle est membre de la coalition PCQVP au Burkina Faso et responsable des questions de genre et de changement climatique de la Plateforme TENFOREST. En tant que responsable des questions du genre dans le cadre de la propriété foncière rurale, et de l’exploitation forestière du projet TENFOREST, Françoise aide les femmes en milieu rural à garantir juridiquement leurs droits fonciers ruraux. Elle fait également partie du groupe multipartite national de l’ITIE au Burkina Faso et est impliquée dans le suivi du processus de l’ITIE-BF. Le Burkina Faso, possède l’un des secteurs miniers les plus dynamiques d’Afrique de l’Ouest. Françoise contribue considérablement à la mise en œuvre du programme d’égalité des sexes de PCQVP visant à promouvoir les droits des femmes dans le secteur extractif.
« Mon parcours professionnel m’a inspiré parce que je souhaitais aider à renforcer les droits politiques des femmes au Burkina Faso, ainsi que leur statut socio-économique en général. La dévalorisation de leur statut est particulièrement ressentie en zone rurale où les femmes ont peu de débouchés et sont victimes de discrimination.
Que l’exploitation minière soit industrielle ou artisanale, les femmes n’ont pas accès aux avantages qu’elles devraient. Elles ne possèdent ni ne contrôlent les terres, et la majorité d’entre elles n’ont aucun pouvoir de décision sur la gestion de ces terres de production qu’elles utilisent.
Les terres qui sont attribuées aux industries extractives par le gouvernement font l’objet d’indemnisation, mais celles-ci sont en générale versées aux hommes qui sont souvent les chefs de famille et/ou les propriétaires des terres et qui les vendent ou les louent à des exploitants industriels ou à des miniers artisanaux.
Les femmes ne peuvent alors plus cultiver ses terres ou y cueillir des herbes, ou récolter des Produits Forestiers Non Ligneux et d’autres produits qui poussent naturellement dans les forêts. Cette situation aggrave l’insécurité alimentaire, ce qui accentue la pauvreté.
En tant que femme, je rencontre souvent des obstacles lors de négociations avec des hommes, y compris les époux, les chefs de concession et les leaders locaux. Leur réaction est rarement prévisible quand il s’agit de parler aux femmes de leurs droits socio-économiques et politiques.
Malgré ces obstacles, le cadre juridique permet de « rêver », alors, je reste convaincue que la majorité des femmes du Burkina Faso, que ce soit dans les zones rurales ou urbaines, jouiront de la totalité des droits socio-économiques et politiques qu’elles méritent dans un avenir proche. »