COP29 : épidémie de répression des défenseur·e·s du climat et des droits humains

Communiqués de presse

Bakou, Azerbaïdjan – Le monde est en proie à une répression sans précédent à l’encontre des activistes climatiques, des défenseur·e·s des droits humains, des journalistes, des universitaires et d’autres personnes qui expriment des opinions contraires à celles de leur gouvernement, selon un nouveau rapport intitulé « Climate Talks and the Chilling Effect : Repression on the Rise », publié le jour de l’ouverture du dernier cycle de négociations des Nations unies sur le climat, qui se déroule en Azerbaïdjan. Le problème est généralisé et trois grands réseaux de la société civile – Climate Action Network, Publiez Ce Que Vous Payez et Global Campaign to Demand Climate Justice – affirment qu’il s’agit d’une épidémie qui entrave l’action cruciale en faveur du climat et qui viole les réglementations sur les droits humains dans le monde entier. Sans ces voix de la société civile, la lutte pour la justice climatique ne peut aboutir, ce qui met en péril l’intégrité des sommets climatiques eux-mêmes.

Le rapport révèle comment la répression et les obstacles, tels que les restrictions de visa et les prix abusifs dans les hôtels, se sont considérablement aggravés lors des dernières négociations des Nations unies sur le climat, de Katowice à Bakou, ainsi que, plus récemment, au Kenya, en Allemagne et au Royaume-Uni. Sans une action urgente des gouvernements et de l’ONU, la COP30 au Brésil pourrait également en être victime, avertissent les organisations.

Tasneem Essop, directrice exécutive du Réseau Action Climat, a déclaré : « Sans une solide défense des droits humains pour toutes celles et ceux qui contestent l’injustice – défenseur·e·s du climat, journalistes et société civile – les fondations de la justice climatique s’effondrent, mettant en péril l’intégrité de la COP29 et de tous les futurs sommets sur le climat. La répression ne se contente pas de réduire au silence les individus ; elle affaiblit notre pouvoir collectif de garantir un avenir durable et juste. Des manifestant·e·s pacifiques du Kenya et de l’Azerbaïdjan aux dirigeant·e·s indigènes d’Amérique latine, celles et ceux qui sont en première ligne risquent tout pour la société et la planète. La COP29 doit être plus qu’un sommet de promesses. Les gouvernements doivent se lever pour mettre fin à la persécution des défenseur·e·s du climat. Car sans eux·elles, nous n’avons pas d’action climatique, nous n’avons que des mots vides de sens ».

Plus de 1 500 défenseur·e·s du climat et des droits humains ont été assassiné·e·s depuis l’adoption de l’Accord de Paris en 2015, et il ne semble pas y avoir de répit puisque le dernier bilan s’élève à 2 100 morts, l’Amérique latine comptant le plus grand nombre d’assassinats recensés dans le monde.

La surveillance, l’intimidation, les lois draconiennes et les brutalités policières sont en hausse, tandis que Gina Romero, rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et d’association, a appelé les gouvernements à « prendre au sérieux les récits hostiles qui se répandent rapidement dans le monde entier, y compris dans les démocraties historiques, pour vilipender et stigmatiser les personnes qui exercent leurs libertés fondamentales. »

L’Azerbaïdjan, premier fournisseur de combustibles fossiles à Israël, accueille la COP29 dans un contexte de violations documentées des droits humains par le gouvernement du pays dirigé par Ilham Aliyev. En 2024, l’Azerbaïdjan a connu la répression la plus sévère de son histoire, avec une forte augmentation du nombre de prisonnier·e·s politiques, le ciblage d’universitaires et les restrictions les plus sévères imposées aux médias dans son histoire en tant que membre du Conseil de l’Europe.

En Allemagne, en avril 2024, la police a réprimé les manifestant·e·s pacifiques pro-palestinien·ne·s, avec de nombreux incidents de force excessive et de détentions arbitraires signalés lors de manifestations dans les grandes villes comme Berlin, tandis que des dizaines de représentant·e·s de la société civile et de délégué·e·s d’Afrique et d’Asie ont eu du mal à obtenir des visas pour assister aux négociations climatiques annuelles de l’ONU.

Asad Rehman, directeur exécutif de War on Want, membre de Global Campaign to Demand Climate Justice (DCJ), a déclaré : « La mort et la destruction dues à la violence climatique et au génocide à Gaza sont activement alimentées par les actions des pays riches tels que les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne. Ils sont prêts à brûler le système fondé sur des règles, à mettre à la poubelle le droit international et à ne même plus prétendre que la vie des personnes noires compte. Lorsque des personnes conscientes se lèvent pour protéger notre planète et dénoncer la complicité des gouvernements occidentaux, de leurs banques et de leurs entreprises qui profitent de la répression et alimentent la catastrophe climatique, elles se heurtent à la répression, à l’autoritarisme et à la criminalisation. Nous nous trouvons à un carrefour où l’avenir même de l’humanité est en jeu, face à une lutte de vie ou de mort pour l’humanité : d’un côté, le droit de chacun·e à vivre dans la dignité, ou un monde de murs et de clôtures et de personnes sacrifiées ».

Plusieurs manifestant·e·s pacifiques et non armé·e·s, dont de nombreux·ses jeunes, ont été tué·e·s et blessé·e·s au Kenya par la police lors des marches #RejectFinanceBill2024 en juin 2024. Au Royaume-Uni, il y a actuellement 41 prisonnier·e·s politiques, parmi lesquel·le·s des militant·e·s qui ont été condamné·e·s à ce que l’on considère comme les plus longues peines jamais prononcées pour des protestations non violentes.

Ketakandriana Rafitoson, directrice exécutive de Publiez Ce Que Vous Payez, a déclaré : « L’escalade de la répression à l’encontre des militant·e·s étouffe les voix qui comptent le plus dans la transition urgente vers un avenir énergétique plus propre et plus juste. Alors que la dépendance à l’égard des combustibles fossiles s’estompe, cette répression n’est pas seulement injuste, elle fait également dangereusement preuve d’absence de vision à long terme. Une transition énergétique juste et équitable nécessite un espace civique ouvert et la participation active de celles et ceux qui sont en première ligne, comme le Dr Gubad Ibadoghlu en Azerbaïdjan, dont les idées et la résilience sont cruciales pour parvenir à un programme centré sur l’homme pour la planète.

Pour faire face à l’épidémie de répression, Climate Action Network, Publiez Ce Que Vous Payez et Global Campaign to Demand Climate Justice demandent ce qui suit :

– Tous les gouvernements, en particulier l’Azerbaïdjan, l’Égypte, les Émirats arabes unis, le Kenya, l’Union européenne – notamment l’Allemagne, et le Royaume-Uni, doivent mettre fin à leur répression de la société civile et des journalistes, libérer toutes les personnes détenues arbitrairement et traduire rapidement les auteur·e·s de ces actes en justice.

– Les États et la communauté internationale, y compris les Nations unies à travers tous ses organes, doivent prendre au sérieux les récits hostiles qui se répandent rapidement dans le monde entier, y compris dans les démocraties occidentales, pour vilipender et stigmatiser les personnes qui exercent leurs libertés fondamentales.

– Les parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques doivent reconnaître le travail légitime des personnes, des groupes et des organisations qui défendent l’environnement et les droits humains, contribuant ainsi à la justice climatique.

– Tous les pays hôtes des réunions et événements liés à la CCNUCC, y compris l’Azerbaïdjan, le Brésil et l’Allemagne, qui accueilleront respectivement la COP29, la COP30 et les sessions des organes subsidiaires, doivent garantir un espace civique ouvert avant, pendant et après les événements et communiquer sur les mesures prises à cet effet.

– Toutes les Parties doivent lutter contre les représailles et les actes d’intimidation à l’encontre des peuples autochtones, des défenseur·e·s ou des activistes climatiques pour leur engagement dans la CCNUCC en dénonçant publiquement tous les cas de représailles et en établissant un point focal accessible pour les représailles, avec pour mandat de collecter des informations, de les partager avec la Sous-Secrétaire générale des Nations Unies aux droits de l’homme et de faciliter les réparations.

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