Les efforts gouvernementaux pour réduire les émissions dans le secteur pétrolier et gazier doivent être plus transparents
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Emily Nickerson, directrice sortante de PCQVP Canada, a apporté son soutien à l’élaboration du rapport d’Oxfam Canada et de l’Institut Parkland mentionné ci-dessous. Ce blog présente les principales conclusions du rapport, et des leçons destinées aux coalitions et aux membres de PCQVP.
Les gouvernements intensifient leurs investissements dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, investissant des milliards dans les nouvelles industries vertes et les efforts d’assainissement des industries polluantes. Ces dépenses doivent faire l’objet d’un suivi. La société civile doit surveiller de près ces investissements pour s’assurer qu’ils ne sont pas de simples primes offertes à l’industrie et que ces fonds publics permettent d’obtenir de plus vastes résultats sociaux et environnementaux. Les citoyen·ne·s et les communautés ne doivent pas devenir les laissé·e·s-pour-compte de cette transition énergétique.
En avril 2020, le gouvernement canadien a annoncé un fonds COVID-19 de 1,72 milliard de dollars canadiens pour aider le secteur pétrolier en Alberta, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique à assainir les puits orphelins et abandonnés. Le gouvernement provincial de l’Alberta, où environ 168 000 puits pétroliers et gaziers inactifs et abandonnés doivent être assainis, a reçu la majorité des fonds, à savoir 1 milliard de dollars canadiens. Ces investissements ont été présentés comme un moyen de respecter les engagements climatiques tout en créant des emplois. Oxfam Canada et l’Institut Parkland ont collaboré à l’examen des fonds octroyés à l’Alberta pour déterminer si les objectifs sociaux et environnementaux établis avaient été atteints. Leur rapport, Not Well Spent: A review of $1-billion federal funding to clean up Alberta’s inactive oil and gas wells (rapport en anglais), met l’accent sur les résultats en matière de réduction des émissions des gaz à effet de serre, de création d’emplois pour les hommes et les femmes et d’incorporation de l’égalité des sexes et des droits des populations autochtones.
Les données disponibles semblent démontrer que ces investissements ont pour unique objectif de sauver l’industrie. La mise en œuvre du programme en Alberta, le « Site Rehabilitation Program » (SRP ; en français, « Programme de réhabilitation de sites »), n’a pas engendré les avantages sociaux et environnementaux promus.
Il semble non seulement que les fonds publics ont substitué des investissements que l’industrie aurait probablement dépensés en activités d’assainissement, mais aussi que le programme comporte des lacunes majeures en matière de transparence et de redevabilité. Les mesures de performance du gouvernement de l’Alberta qui servent à évaluer le programme et les sites assainis lors du programme ne sont pas accessibles au public. De plus, les objectifs environnementaux n’ont pas fait l’objet d’un suivi ou d’un rapport. L’assainissement des puits devrait réduire les émissions de méthane, qui est un puissant gaz à effet de serre. Cependant, la réduction des émissions ne fait pas l’objet d’un suivi. Les performances des sociétés ne peuvent par conséquent pas être mesurées et l’ampleur de la réduction obtenue grâce à cet investissement gouvernemental est très incertaine.
Une divulgation accrue des informations n’est pas seulement essentielle à l’évaluation de la performance de ces types d’investissements, elle est également cruciale pour comprendre quels sont les investissements les plus efficaces et partager les leçons qui en sont tirées, et pour augmenter la participation des citoyens et des communautés. Les gouvernements et les pays cherchant à rapidement investir pour limiter les émissions, la transparence est plus cruciale que jamais. Une transition juste sur le plan économique et social vers une économie à faible carbone requiert des programmes et des politiques transparentes et inclusives.
Les lacunes de ces premiers efforts au Canada donnent aux gouvernements et aux défenseur·se·s de la transparence l’opportunité d’exiger des futurs programmes qu’ils soient plus efficaces. Le rapport recommande que les futurs programmes :
- mettent en place, en tant que précurseurs, des règlements plus stricts pour garantir que le passif de l’assainissement soit comptabilisé dans les bilans des sociétés et que des fonds appropriés soient obtenus pour couvrir ces coûts ;
- prennent en considération, et publient officiellement, la qualité des emplois financés par les fonds publics et qui profite de ces emplois. Il est important que les gouvernements effectuent un suivi et publient officiellement les informations nécessaires à l’évaluation des programmes, y compris les divulgations publiques requises pour évaluer si les fonds publics entraînent de nouvelles dépenses supplémentaires du secteur privé ou ne font que les remplacer ;
- allouent une portion des fonds directement aux communautés autochtones, qui sont les mieux à même d’évaluer les risques et d’établir les priorités concernant leurs propres terres ;
- priorisent les sites en fonction du risque environnemental tout en permettant la participation publique et une implication communautaire significative.
Une transition juste exigera un examen étroit des bénéficiaires des investissements et des résultats obtenus. Les coalitions et les membres de PCQVP devraient s’appuyer sur cette étude de cas au Canada pour exiger une transparence accrue des programmes actuels, pour intégrer des moyens de concrétiser les objectifs sociaux et environnementaux des futurs programmes, et plus généralement pour garantir que l’environnement réglementaire force les pollueurs, et non le public, à payer pour l’assainissement.
Vous voulez en savoir plus ?
Lisez le rapport complet ici (en anglais).
Regardez le webinaire (en anglais) de PCQVP Canada et de PCQVP États-Unis sur les divulgations nécessaires à une transition juste (mettant l’accent sur la divulgation du passif et des réserves).
Lisez la position de PCQVP en matière de transition énergétique.